L'histoire du Kung Fu de la Grue Blanche de FuJian
L’historique présenté ci bas est détaillé puisque l’historique de l’art n’a jamais été mis à la disposition du public occidental. Pour en savoir davantage sur l’historique, les théories, et les techniques de la Grue blanche, veuillez consulter : « Shaolin White Crane Kung Fu : A rare art revealed » par Lorne Bernard ou « Authentic White Crane Kung Fu » par Lee joo-Chian et Lorne Bernard.
L'histoire du Kung Fu de la Grue Blanche de Fukien (Fujian) s'est transmise de maître à élève (de père en fils) depuis cinq générations. Bien que différentes versions existent quant à cette histoire, elles racontent toutes un récit similaire. L'histoire du Kung Fu de la Grue Blanche tel que transmis au sein de la famille Lee est la version présentée ici. *1
Fang Chi-Niang naît au milieu du 18e siècle à Lei Chow Fu. Le nom de son père est Fang Hui-Sz et celui de sa mère Lee Pik-Liung. Fang Hui-Sz a étudié le Kung Fu au temple Shaolin du Mont des Neuf Lotus, dans le district de Ching Chiang, province de Fujian (anciennement Fukien). Sa femme et sa fille vivent à Lei Chow Fu. Comme ils sont pris à partie par les propriétaires terriens du voisinage, ils décident de déménager loin du village, ce qui les conduit éventuellement au temple de Ching Chu, sur le Mont Ching Chea (Lei Chow Fu).
Un jour, Fang Chi-Niang fait sécher du grain devant le temple. Elle voit une grande grue blanche descendre du toit et commencer à picorer le grain. Elle s'arme d'une tige de bambou afin de chasser l'intrus. La grue lui inspire à la fois crainte et curiosité. Elle tente d'abord de frapper la tête de l'oiseau mais celui-ci se montre habile à l'esquive. Elle essaie ensuite de piquer le corps de l'oiseau mais celui-ci recule et utilise son bec pour frapper la tige de bambou.
Fang Chi-Niang est fort surprise. Elle continue d'utiliser les techniques apprises de son père, mais en vain. Étonnée par l'adresse de la grue, Fang Chi-Niang cherche chaque jour à pratiquer avec l'oiseau, ce à quoi la grue donne son concours. Cette pratique permet à Fang Chi-Niang d'analyser et d'assimiler les stratégies d'autodéfense de l'oiseau. Avec le temps, elle acquiert la maîtrise des mouvements et de l'esprit de la grue blanche. *2
C'est au cours de cette période que l'empereur Chien Lung ordonne la destruction du temple Shaolin du Sud, soupçonnant qu'il s'agit d'un foyer d'activité révolutionnaire. Fang Hui-Sz est l'un de ceux qui ont la bonne fortune d'échapper à cette attaque. Il va chercher sa femme et sa fille pour aller s'établir à Pik Chui Liang. Par la suite, Fang Hui-Sz s'installe au temple de Sah Liang, près de Foochow, où il passe ses temps libres à aider sa fille à parfaire son Kung Fu du Shaolin.
Fang Chi-Niang en vient éventuellement à maîtriser tout ce que son père peut lui enseigner et choisit de marier l'esprit de la grue aux mouvements de son Kung Fu du Shaolin. Elle enseigne le Kung Fu dans le temple Sah Liang à Weng Wing-Seng, Lee Fah-Sieng , Chang Teh-Cheng et Ling Te-Sun . Weng est originaire de Lei Chow Fu, Lee du district de Chow Ann, Chang du district de Wing Chun et Ling de Foochow. Weng et Lee ont plusieurs élèves au Pic de Kao Pei et y mettent sur pied une école. Chang (surnommé le « Moine aux neuf points ») s'établit au temple de la Grue Blanche et y enseigne les arts martiaux. Les descendants de Ling s'installent à Taiwan. Lee transmet son savoir à son fils Lee Mah-Saw. Lee Mah-Saw enseigne dans le district de Chow Ann et continue également d'ouvrir de nouvelles écoles. Les enseignements originaux de Fang Chi-Niang font l'objet de diverses interprétations qui engendrent quatre styles principaux : la « Grue volante » (Flying Crane - Fei He), la « Grue dévorante » (Eating Crane - Shi He), la « Grue criante » (Screaming Crane - Ming He) et la « Grue dormante » (Sleeping Crane - Jan He ou Su He). De nouvelles interprétations et combinaisons avec d'autres styles ont par la suite multiplié les variantes de Kung Fu de la Grue Blanche de Fukien.
Il pourrait être utile, à ce stade, de débattre la question de savoir si les arts de la Grue Blanche de Fukien sont vraiment des systèmes du Shaolin ou s'ils représentent une école distincte. Parce que ceux-ci ont été élaborés hors du temple, plusieurs maîtres de la Grue Blanche des générations antérieures ne considèrent par leur art comme un art Shaolin. Cette conviction est renforcée par le fait qu'aux niveaux avancés d'apprentissage, la Grue Blanche se concentre principalement sur la puissance relaxe (soft power). Par contre, la fondatrice a appris surtout de son père qui était un expert du Shaolin du Sud. Il est par conséquent difficile de trancher, puisqu'il s'agit en définitive d'une question de point de vue. Il est peut-être préférable de reconnaître à la fois les racines de cet art et l'apport unique de sa fondatrice.
*1 Ce témoignage vient du grand-maître Lee Kiang-Ke et a été recueilli par Shifu Lorne Bernard lors de son premier voyage en Orient en 1989. Il existe plusieurs versions des origines du Kung Fu de la Grue Blanche de Fukien. Heureusement, celles-ci sont pratiquement similaires et réfèrent toute à la rencontre de la grue, et au fait que Fang Chi-Niang est éventuellement devenue experte en arts martiaux.
*2 Il est à noter que dans le récit du grand-maître Lee, la grue est posée comme l'incarnation d'une déité descendue du ciel afin d'enseigner les arts martiaux à Fang Chi-Niang.